Présentation de l’UFC Fight Night 128 (21 avril 2018) – Le show des oubliés qui veulent revenir sur le devant de la scène
Edson Barboza et Kevin Lee qui porteront le main event sur leurs épaules, mais aussi Frankie Edgar, Dave Branch, Aljamain Sterling ou Jim Miller, cet UFN est placé sous le signe des valeur sûres ayant loupé l’ultime strapontin vers les sommets. Certains auront particulièrement intérêt à ne pas fléchir.
Reconnaissons-le, une carte de l’UFC sans titres défendus ou grosses stars ne soulève pas un enthousiasme spontané. Aussi, on aurait tendance à snober ce show de prime abord, alors qu’en y regardant de plus prés on relève une opposition entre deux des meilleurs poids légers en activité, un duel entre deux tops 5 de la division des plumes, un pur affrontement de poids lourds à l’ancienne, mais aussi un ancien recalé ayant su redorer son blason au WSOF (Dave Branch), un Gallois invaincu et double champion Cage Warriors/Titan FC (Brett Johns) ou encore des anciennes « terreurs » voulant se rappeler à notre souvenir (Ryan Laflare, Siyar Bahadurzada).
Poids légers : Edson Barboza (19-5) vs Kevin Lee (16-3)
Voici un choc qui aura pour tâche de répondre à l’épique Dustin Poirier/Justin Gaethje disputé dans la même catégorie la semaine dernière. Devant le flottement pour désigner le premier challenger du nouvellement couronné Khabib Nurmagomedov, chacun délivre ses arguments. Malgré un classement probant (#5 et #6), ces deux-là apparaissent cependant éloignés de la course au title shot. Pour une raison évidente concernant Edson Barboza : il a été surclassé par Khabib en personne en fin d’année 2017. Quant à Kevin Lee, il a échoué à obtenir le titre interim en octobre dernier face à Tony Ferguson…l’adversaire maudit qui devait initialement disputer la ceinture suprême au Russe (quatrième annulation pour ce combat). Il faudra donc une sacrée performance pour que l’élève de la Xtreme Couture postule de nouveau à l’or. Lee possède à seulement 25 ans des atouts enviables : une lutte féroce assimilée aux besoins du MMA, un art consommé du Rear-Naked Choke et une faculté à dominer sur le long terme (une seule défaite par décision en huit recours aux juges). Son striking reste à ce jour trop limité voire défaillant, évidence soulevée après son échec face à Ferguson. D’ailleurs, Lee a déclaré avoir apporté de nombreux changements à ses camps d’entraînements pour 2018, dans le but de devenir un des fighters les plus électrisants du circuit. Quelle surprise doit-on attendre de cette promesse ?
Barboza n’en aura cure, il a de quoi y répondre avec son arsenal de striker polyvalent (boxe, taekwondo, muay thaï) et son JJB appris sous l’expertise de Ricardo Almeida. Habitué des bonus « fight of the night » (six entre 2011 et 2015) comme des finishs d’anthologie (Wheel Kick sur Terry Etim, coup de genou sauté devant Beneil Dariush), le Brésilien apparaît légèrement favori.
Lee pourra toujours s’appuyer sur le mode d’emploi « vaincre Barboza pour les nuls », fourni en HD par Nurmagomedov, quant à le reproduire à la lettre…
Poids plumes: Frankie Edgar (22-6-1) vs Cub Swanson (25-8)
C’est une petite légende qui s’est effondrée début mars : l’inépuisable Frankie Edgar, réputé spécialiste des affrontements sur cinq rounds par son cardio et sa résistance insensée aux coups, a concédé sa première défaite par finalisation face à Brian Ortega, via un KO clair et net au premier round. Un coup dur pour l’homme surnommé The Answer, voué à la base à prétendre au titre de Max Holloway. Où était passé celui qui tenait la dragée haute à BJ Penn pendant cinquante minutes en 2010, au cumul des deux combats, et résistait deux fois de suite à l’avalanche de frappes assénée par un Gray Maynard alors invaincu l’année suivante ? Pas trop loin a priori, car une fois digéré les décisions controversées en faveur de Benson Henderson lui ayant coûté le titre des légers, Edgar a prouvé être mieux qu’un marathonien en devenant un des strikers les plus tranchants à 66 kg. Couplée à une ceinture noire de JJB et une lutte de classe mondiale, cette faculté lui a assuré une présence continue dans les tops 5/tops 10 depuis bientôt dix ans. Aussi doit-il accepter l’irruption fracassante de Brian Ortega comme celle d’un héritier, tout en cherchant à le talonner. La remarque vaut aussi pour son compatriote Cub « Killer » Swanson, sortant d’une défaite toute aussi radicale face à la nouvelle sensation de la catégorie. À défaut de savoir conclure ses combats avant la décision ces dernières années, l’élève de Greg Jackson conserve l’image d’une polyvalence spectaculaire. Il délivre un striking surprenant et créatif, mais garde une faiblesse certaine au sol malgré un solide apprentissage en judo/jiu-jitsu brésilien. Six de ses huit défaites ont été causées par des manœuvres de soumission. Swanson a vu sa notoriété boostée par son apparition dans la série Kingdom, se déroulant dans l’univers du MMA, mais aussi au nombre de bonus « fight of the night » stockés à l’UFC et au WEC, dont trois consécutifs série en cours…
Poids lourds : Chase Sherman (11-4) vs Justin Willis (6-1)
Qu’attendre de cet affrontement entre deux poids lourds sans grands états de services ? Et bien qu’ils se révèlent justement ! Justin « Big Pretty » Willis a déjà donné des éléments de réponses lors de ses premières joutes octogonales en 2017. Après son KO expéditif sur Allen Crowder à l’UFC 218, on lui promettait une tête d’affiche pour sa prochaine sortie. Au lieu de cela, il devra se contenter d’un rival un poil plus expérimenté à l’UFC, Chase « The Vanilla Gorilla » Sherman, cinq duels à son actif dans la grande compagnie (bilan négatif de 2-3). Tandis que Willis franchit rapidement les paliers au sein de l’AKA où son principal équipier se nomme Daniel Cormier, son adversaire du soir paraît un peu léger. Polyvalent certes, mais à un faible degré, à l’image de sa classification en lutte NCAA Division II ou à sa modeste ceinture violette de kickboxing. Ce combat pourrait donc constituer la dernière marche vers la sortie de Sherman, et n’être qu’une étape anecdotique de l’ascension de Willis.
Poids moyens : Dave Branch (21-4) vs Thiago Santos (17-5)
Revenir à l’UFC après des années d’exil n’est pas une finalité en soi. Alors qu’il sortait d’un run ultra dominant au WSOF, Dave Branch l’a appris à ses dépens lorsqu’il a dû abdiquer sous les coups de Luke Rockhold en septembre dernier. Lors de sa première pige octogonale en 2010-2011, l’Américain n’est jamais sorti du ventre mou de la catégorie middleweight, ce qui n’a pas empêché la compagnie leader de le classer directement parmi ces tops à son retour l’an dernier. Logique prise en compte de sa dizaine victorieuse au WSOF où il a croisé le fer avec d’anciennes gloires comme Yushin Okami ou Paulo Filho. Branch a un rapport aux arts martiaux un peu particulier pour un Américain puisqu’il n’a pas de parcours initial en lutte. Sa spécialité d’origine est le karaté, puis il a opté pour un perfectionnement en JJB sous l’égide de Renzo Gracie. Ce qui en a fait l’un des grapplers les plus techniques du circuit, muni d’un apanage de finalisations au sol très varié. On peut le résumer comme une antithèse d’un autre transfuge majeur issu du WSOF, l’instinctif Justin Gaethje. Aussi devra-t-il craindre les atouts d’un Thiago Santos tout aussi explosif, actuellement en plein rush via une série de quatre succès par KO/TKO. Le Brésilien mixe tous les aspects du muay thaï et de la capoeira pour s’éviter d’aller au verdict des juges (seulement quatre fois dans sa carrière), il possède aussi certaines compétences en phase de combat au sol mais privilégie le stand up. Et on ne voit pas pourquoi il en ferait autrement devant un spécialiste de JJB.
Poids coqs : Aljamain Sterling (14-3) vs Brett Johns (15-0)
Invaincu jusqu’au milieu de l’année 2016, Aljamain Sterling a vu son aura pâlir à mesure de la difficulté des oppositions proposées. Après deux courtes défaites par décision partagée contre Bryan Caraway et Raphael Assunçao, le Funk Master avait su se relancer en 2017, modifiant son style pour privilégier la boxe traditionnelle à ses récurrents middle/legs kicks, pas appréciés à leur juste valeur par les juges selon lui. Hélas, l’année se conclut par un revers plus significatif face à l’ancien champion WSOF Marlon Moraes. Sterling reviendra-t-il de ce KO retentissant en 67 secondes ? Face à lui, la grande révélation de l’année écoulée chez les poids coqs : Brett Johns, qui se cherche une place dans la hiérarchie après trois victoires faciles à l’UFC. Si les deux combattants partagent une créativité certaine, l’enjeu d’une sortie du top 15 pour le perdant, autant que la nature tactique des opposants, risque de conduire à un duel fermé. Combattant moderne par excellence, ayant appréhendé le MMA comme un ensemble et non les disciplines séparément, Johns part avec un léger avantage.
Poids légers : Jim Miller (28-11 + 1 NC) vs Dan Hooker (15-7)
Il était une fois l’un des plus grands « rois sans couronne » de l’histoire de l’UFC. Jim Miller, un monsieur-tout-le-monde vu de l’extérieur, une absence de charisme cruelle tout comme un déficit en striking coupable. Et pourtant, ce stratège iconoclaste, membre continu de l’organisation depuis 2008 et bientôt recordman des combats disputés au train où il va (28, seul Michael Bisping le devance en la matière), a délivré des performances mémorables. De par sa récurrence à tenter des prises de soumission tous azimuts ou sa résistance guerrière lorsque l’adversité prend le dessus (huit défaites sur onze à la décision). Le pugilat dantesque face à Joe Lauzon a même été consacré « fight of the year » en 2012. La série de trois défaites consécutives en 2017 a définitivement torché l’espoir de concourir un jour à une ceinture. A priori Dan Hooker n’est pas exactement le foudre de guerre devant poursuivre ce cycle maudit. Arrivé à l’UFC voilà quatre ans, le Néo-Zélandais a essentiellement combattu sur les shows s’étant déroulés sur le continent océanien. Malgré un background plutôt complet (muay thaï, kickboxing, jiu-jitsu), Hooker présente déjà trois échecs en huit présences dans l’Octogone, peinant notamment face à des lutteurs. Alors il serait étonnant de voir se refermer le livre Miller en ses terres natales du New Jersey.
Un mot sur la carte préliminaire : La compilation des anciens « buzz »
À l’heure de publier ces lignes un doute demeure sur l’affrontement prévu entre Merab Dvalishvili et la nouvelle recrue Ricky Simon. Sans lequel la carte préliminaire comprendrait le même nombre de de combats au compteur que la principale. Elle est composée de figures assez connues des fans et d’une pluralité de nationalités rare sur un show se déroulant aux USA. Chez les welters, l’ancienne sensation Ryan Laflare aura tout loisir de se relancer face à l’irrégulier Alex Garcia. Même catégorie et même obligation de marquer les esprits pour l’Afghan Siyar Bahadurzada, présenté comme un véritable épouvantail à son arrivée en 2012, mais miné par les blessures au point de ne combattre en moyenne qu’une fois par an. Chez les mouches, le Russe Magomed Bibulatov devra réagir à sa première défaite en carrière fin 2017 s’il veut prétendre un jour au titre de Demetrious Johnson. Notons enfin la présence des expérimentés japonais Ulka Sasaki et Keita Nakamura.
Retrouvez la carte complète de l’évènement ici.
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